Portrait d’éleveuse : Hélène Fréger

Publié le 16.10.2015 , mis à jour le 28.10.2022

Portrait d’une éleveuse atypique.

Souvenez-vous d’Hélène Fréger : après un DUT de chimie et un emploi chez Michelin, cette éleveuse atypique est retournée à ses racines agricoles à Venesmes, au cœur du Berry. Elle est aujourd’hui à la tête de 156 hectares de cultures et de prairies, 70 vaches laitières de race Prim’Holstein et 19 bassins piscicoles. Un projet innovant et unique en France qui lui vaut de participer aux trophées de l’agro-écologie 2015 : dans un contexte pourtant difficile, les éleveurs laitiers n’en finissent pas de se réinventer. Leur objectif ? Vivre mieux en fortifiant leur engagement dans tous les aspects du développement durable : depuis toujours, la nature est leur gagne-pain !

Les produits laitiers :

Une ferme laitière spécialisée dans la pisciculture : voilà un concept particulièrement original ! Quelle est l’histoire de ce projet ?

Hélène Fréger :

C’est une histoire de hasard et de choix économique. Après avoir repris mes études pour retrouver le monde agricole, j’ai rejoint l’exploitation familiale. Dans les années 1980, nous avons créé un étang, plus exactement une réserve d’irrigation de 2,5 hectares pour arroser les cultures. On y mettait des poissons à pêcher pour l’amusement de la famille. À côté de ça, on avait une grande fosse pour stocker le lisier, un mélange d’eau et de déjections propre aux élevages. Un été, à cause de pluies diluviennes, le lisier a ruisselé jusqu’à l’étang et, quelques mois après, on s’est rendu compte que les poissons s’étaient multipliés de façon considérable. Mon père cherchait alors des revenus complémentaires. Il a pensé à une diversification autour de la pisciculture. Nous avons rationalisé ce que nous avions constaté de manière empirique et, aujourd’hui, nous élevons les poissons de A à Z, depuis les minuscules larves jusqu’aux gros spécimens.

Les produits laitiers :

À quel usage les poissons sont-ils destinés ?

 

Hélène Fréger :

Il s’agit surtout de poissons d’ornement que les clients achètent pour leurs bassins ou aquariums. Depuis quelques années, je propose notamment des carpes koï européennes, particulièrement jolies et colorées. J’élève également des carpes dites « amour blanc », qui régulent la flore dans les étangs. Enfin, au moment des fêtes de fin d’année, je vends des poissons comestibles comme les brochets ou les sandres. La plupart de mes clients sont des particuliers, mais je compte également quelques collectivités.

Les produits laitiers :

Dans la vie quotidienne à la ferme, quel est le lien entre l’activité laitière, les cultures au sol et les bassins de pisciculture ?

 

Hélène Fréger :

Les trois ateliers sont complémentaires et forment un véritable cercle vertueux. Pour schématiser, les déjections liquides des vaches laitières sont récupérées dans l’étable. Elles sont déversées dans l’étang où elles nourrissent les phytoplanctons qui nourrissent eux-mêmes les zooplanctons, pour arriver enfin aux larves et aux poissons dans les bassins. C’est donc une « chaîne alimentaire aquatique » qui commence avec les vaches. Cette technique de dépollution des eaux naturelle et écologique s’appelle le lagunage, mais nous allons encore plus loin que les projets habituels, car une partie de l’eau sert ensuite à arroser les cultures qui nourrissent le troupeau. La boucle est bouclée !

Les produits laitiers :

Vous avez été sélectionnée pour participer aux trophées de l’agro-écologie. De quoi s’agit-il ?

Hélène Fréger :

C’est un concours national organisé par le Ministère de l’agriculture. Il récompense les projets innovants et respectant les principes de l’agriculture durable. Notre projet répond à tous ces critères. Il est d’abord novateur, ce qui explique pourquoi il a fallu plusieurs années pour obtenir toutes les autorisations administratives ! Économiquement, le concept est rentable. Socialement, je travaille avec deux salariés à temps plein et chacun d’entre nous doit être qualifié sur tous les postes de l’exploitation. Écologiquement, enfin, ce système permet de recycler et d’économiser les ressources en créant un cycle de production intelligent. Je cherche également à produire sur place la plus grande partie de l’alimentation des animaux afin de tendre vers l’autonomie, le tout en pariant sur la biodiversité des cultures (céréales, luzerne, pois, lin, maïs, vesce…), les rotations et d’autres techniques permettant d’améliorer la qualité des sols. Le tout se fait bien sûr dans le respect du bien-être animal : dans les élevages français, où les troupeaux sont de taille réduite, le lien avec les animaux reste quotidien et individualisé. Avec ce concours, j’ai à cœur de faire connaître mon engagement, pourquoi pas susciter des vocations, et surtout découvrir les nombreux projets innovants et écologiques qui maillent l’ensemble du territoire agricole français.

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