« Tu ne cuiras pas l’agneau dans le lait de sa mère »

Publié le 25.07.2012 , mis à jour le 03.11.2022

Dans le judaïsme, viande et produits laitiers ne doivent pas être mélangés. Retour sur l’un des interdits alimentaires les plus importants de cette religion.

Lait bouillant dans une casserole

. © Adobe Stock / tango_cat

Un interdit central de la cacherout

La cacherout désigne les lois alimentaires prescrites aux juifs* par divers passages de la Bible hébraïque (Torah) et leurs interprétations. Selon la tradition juive, ces lois furent révélées par Dieu à Moïse sur le mont Sinaï. Elles déterminent ce qui est autorisé (cacher) et ce qui est prohibé (terefah).

Elles établissent notamment les règles pour préparer la viande, de façon à éviter la consommation de sang, et imposent la séparation entre viande et produits laitiers. Ce dernier interdit se base sur un commandement répété à trois reprises dans la Torah : « Tu ne cuiras pas le chevreau dans le lait de sa mère » (Exode XXIII, 19 et XXXIV, 26 et Deutéronome XIV, 21).

 

Comment cela se traduit-il dans la cuisine ?

Cet interdit ne signifie pas que les juifs ne doivent pas consommer de produits laitiers. Au contraire, ces derniers sont très présents dans les traditions culinaires des Juifs du monde entier : yaourt chez les Séfarades du Moyen-Orient, crème aigre et fromage chez les Ashkénazes d’Europe centrale et d’Amérique

Cela veut simplement dire que les juifs pratiquants ne peuvent pas cuire les aliments lactés et carnés ensemble, ni les consommer au cours d’un même repas : les produits laitiers peuvent être dégustés après la viande à la suite d’un délai dont la durée varie selon les coutumes locales (six heures pour les juifs d’Europe centrale, trois heures pour les Allemands, une heure pour les Hollandais…).

Selon le degré de pratique religieuse, viandes et produits laitiers sont même isolés à tous les stades de leur emploi (rangement, vaisselle, ustensiles…).

 

Pourquoi cet interdit ?

L’interdit de « cuire le chevreau dans le lait de sa mère » a été interprété de plusieurs manières par la tradition rabbinique et les anthropologues : volonté de rompre avec d’anciens rites de fertilité païens, distinction du groupe de fidèles des autres, besoin de spiritualité et d’élévation qui détache l’homme de son animalité, souci d’éviter toute cruauté envers les animaux, séparation de la vie et de la mort, métaphore du tabou de l’inceste…

Quoi qu’il en soit, cet exemple montre que les interdits alimentaires ne sont pas biologiques mais culturels puisque l’homme est omnivore : marqueurs identitaires par excellence, ils constituent des manifestations collectives témoignant de l’appartenance à un groupe. De plus, chez les Juifs, dans un contexte multi-séculaire de diaspora, le respect des lois alimentaires maintient et renforce l’identité commune des juifs pratiquants.

 

* Le mot Juif avec une majuscule désigne un membre du peuple juif, tandis que le mot juif sans majuscule qualifie une appartenance religieuse.

Transparence ! Voici nos sources...

  • NIZARD Sophie, « Tu ne cuiras pas le chevreau dans le lait de sa mère », dans POULAIN Jean-Pierre (sous la direction de), L’homme, le mangeur et l’animal. Qui nourrit l’autre ?, Les Cahiers de l’Ocha N°12, 2007.
  • RODEN Claudia, Le livre de la cuisine juive, Flammarion, nouvelle édition 2012.
  • FAURE Laurence, « Sens et enjeux d’un interdit alimentaire dans le judaïsme », Anthropology of food [Online], 7 | December 2010, Online since 25 December 2010, connection on 16 July 2012. URL : http://aof.revues.org/6548

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