Le munster, un fromage de caractère
Le seul fromage AOP du Nord-Est de la France cache, sous sa croûte orange et odorante, une pâte particulièrement douce et crémeuse. Le munster alsacien, que l’on appelle « géromé » en Lorraine, fut sans doute créé par les moines bénédictins venus fonder vers 660 l’abbaye Saint-Grégoire de Munster. Grâce à la richesse de ses prairies, la vallée s’est en effet prêtée, de tous temps, à l’élevage des vaches, en particulier les fameuses Vosgiennes. Il s’agit d’un fromage à pâte molle et croûte lavée : pendant son affinage, il est, comme son nom l’indique, régulièrement lavé en surface avec de l’eau salée et des « ferments du rouge » (Brevibacterium linens). Son goût, plus doux que son odeur puissante et entêtante mais particulièrement long en bouche, présente des saveurs franches de lait et des arômes de foin, d’étable, d’ammoniaque, de fruits et d’épices. À découvrir dans les fermes-auberges de la route du munster !
Quel pain pour le munster ?
Pour profiter pleinement du tempérament d’un munster bien affiné, pourquoi ne pas essayer une baguette aux graines ? Plus typée que la baguette mais moins dense que le pain de campagne, dotée de force mais sans acidité, enrobée d’une croûte bien croustillante, elle s’accorde parfaitement avec la tendre pâte du fromage. Le munster se plaît aussi avec le pain au cumin, une épice qui l’escorte particulièrement bien il existe d’ailleurs un munster parfumé au cumin, autrefois réservé au repas de Noël en raison des vertus digestives de la précieuse épice ! Plus audacieux, le mariage avec un pain aux lardons fumés prolonge le plaisir de la dégustation en apportant encore plus d’élégance au fromage, tout en rappelant les plats traditionnels de l’Est de la France. À éviter : les pains aux fruits séchés (abricots, figue…), trop sucrés, qui éclipsent la subtilité des arômes du munster, ainsi que le pain de seigle, trop typé.
En guise de boisson : vin d’Alsace, bière ou bourbon ?
Pour un accord de terroir classique et efficace, les vins d’Alsace s’imposent, en particulier le gewurztraminer qui fait des merveilles : corsé et très aromatique, ce vin prestigieux aux reflets dorés garde toute sa complexité et sa finesse au contact du munster, tout en répondant au caractère affirmé de ce dernier. Aussi local mais plus original, le mariage avec une bière alsacienne a ses inconditionnels : une bière de caractère, brune, ambrée ou blonde forte, assez alcoolisée et amère, dégraisse le palais et désaltère après la dégustation du fromage gras et coulant. Mais l’union la plus insolite est celle qui unit le munster au bourbon whiskey : cet alcool originaire du Kentucky (États-Unis) comporte au moins 51 % de maïs et passe par une phase de filtration au charbon de bois, ce qui lui confère des arômes très spécifiques. Servi à 11-12 °C (placé au réfrigérateur une trentaine de minutes avant la dégustation), coupé avec le même volume d’eau minérale neutre pour éviter que la puissance de l’alcool ne brûle les sensations gustatives, il répond à la force du fromage et prolonge ses arômes.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
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